Les 6 et 7 janvier 2020, CAMELEON a participé aux 7ème Assises Internationales de notre partenaire Stop aux Violences Sexuelles, à l’UNESCO. L’association SVS vise à éradiquer les violences sexuelles avec une stratégie de santé publique de type vaccinale.

D’après le Conseil de l’Europe, 1 enfant sur 5 est victime de violences sexuelles. Cela peut avoir des conséquences durables sur la santé mentale mais aussi entraîner des pathologies multiples au niveau du corps. Par ailleurs, il existe un risque de reproduction des violences ou de re-victimisation pour les personnes concernées. Les violences sexuelles peuvent ainsi être comparées à une épidémie de type virale, d’après l’ampleur des dégâts quantitatifs et qualitatifs chez les êtres humains.

Fondée par des médecins, l’association a créé des protocoles de soins pour les victimes de violences sexuelles et développe des actions de sensibilisation et de prévention ainsi que des formations pluridisciplinaires. Les Assises sont l’occasion de mesurer chaque année les progrès réalisés dans le cadre de la stratégie SVS ainsi que les efforts à poursuivre. Elles réunissent des expert.e.s et des professionnel.le.s pour échanger sur les travaux de recherche et les bonnes pratiques dans différents pays. Retour sur 3 temps forts de ces deux journées.

Les omertas institutionnelles : pourquoi les victimes ne parlent pas ?

Peur des représailles ou de ne pas être crues, sentiment de honte ou de culpabilité, volonté d’oublier, isolement, amnésie traumatique, dépendance financière, proximité avec les agresseur.e.s : les raisons pour lesquelles les victimes de violences sexuelles ne parlent pas sont nombreuses et complexes. Et lorsque cela arrive dans le cadre d’une institution, il est d’autant plus difficile de briser l’omerta. Lors d’une table-ronde, plusieurs intervenant.e.s ont témoigné de la loi du silence dans le monde religieux, l’aide sociale à l’enfance et le monde militaire.

Dans les institutions, la parole libérée crée le scandale. C’est celui / celle qui parle qui va déranger et choquer et non pas l’agresseur.e. Quand la culture institutionnelle domine la liberté de penser et d’agir des individus, c’est l’appartenance au groupe qui est plus forte, avec le respect de ses normes et de ses dogmes. L’omerta porte sur le silence des autres, celui de ceux et celles qui n’ont pas parlé, silences complices. Parler c’est se détacher d’un groupe auquel on appartient.

Rompre l’omerta c’est se mettre en danger, c’est trahir le groupe et en être exclu car on entache sa réputation, celle de l’institution, de son autorité et de ses représentants. Pour un enfant pris en charge par l’ASE, révéler des faits de violences sexuelles perpétrés par la personne qui l’éduque et a autorité sur lui ce serait risquer de se retrouver isolé dans une situation encore plus difficile : sans toit, sans nourriture, sans adulte pour répondre à ses besoins physiologiques…

Voici une sélection de ressources pour en savoir plus et découvrir des témoignages.

  • Sur les violences sexuelles dans l’armée : La guerre invisible, de Leila Minano et Julia Pascual, 2014, éditions les Arènes

  • Sur les violences conjugales subies par des conjointes des forces de l’ordre : Silence, on cogne, de Sophie Boutboul et Alizé Bernard, 2019, éditions Grasset

  • Sur les violences pédocriminelles dans l’Eglise : Spotlight, documentaire réalisé par Tom McCarthy, 2015

Primum non nocere : comment accompagner la grossesse en cas de violences sexuelles ?

La grossesse peut être une période délicate pour les personnes qui ont été victimes de violences sexuelles durant leur enfance. Eric Lemasson a réalisé le film « Primum non nocere » pour sensibiliser à ce sujet aussi difficile que tabou. Des études montrent que ces victimes, quand elles n’ont pas suivi de parcours de soins, peuvent avoir davantage de risques de complications pendant la grossesse et l’accouchement. L’association SVS plaide pour un accompagnement bienveillant, rassurant et adapté pour la future mère ayant des antécédents de violences sexuelles ainsi que pour son/sa conjoint.e.

Questionnement systématique du corps médical sur les violences, prise en charge d’un parcours de réparation pour toutes les victimes de violences sexuelles, ce sont aussi les revendications de CAMELEON dans le cadre de nos actions de plaidoyer.

Découvrez le documentaire Primum non nocere :

Education à la sexualité : comment prévenir les violences chez les jeunes ?

Les mineur.e.s peuvent être victimes mais aussi auteur.e.s de violences sexuelles. L’éducation à la vie affective et sexuelle est un volet essentiel de notre programme de prévention. Nous avons participé à des ateliers présentant des bonnes pratiques canadiennes auprès des jeunes.

Le programme BÉRA est issu d’un projet de recherche mené à Montréal auprès des étudiantes des campus d’université. Il a contribué à réduire les taux d’agressions sexuelles et permet de débattre, de déconstruire les mythes autour du viol et d’échanger autour de stratégies pour identifier des agresseur.e.s potentiel.le.s, pour apprendre à se défendre et à répliquer.

Le message clé transmis est le suivant : « Vous n’êtes pas responsable des comportements de violence à votre égard et vous pouvez y résister ! »

Enfin, les aspects relationnels sont primordiaux dans le cadre des ateliers de sensibilisation auprès des élèves et étudiant.e.s. Il s’agit notamment de lutter contre la violence et les rapports de domination véhiculés à travers les représentations de la pornographie. Une relation sexuelle, c’est « un moment partagé entre des êtres consentants qui éprouvent du désir l’un pour l’autre, dans un état de confiance et de lâcher-prise pour connaître du plaisir en toute sécurité et liberté » selon Nicole Andrieu, sage-femme sexologue et intervenante pour l’association.

Autre thème de prévention à aborder en milieu scolaire : l’exposition des jeunes aux violences sexuelles sur Internet. Ne manquez pas notre dossier spécial sur la protection en ligne des mineur.e.s, à venir en février !